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Plaidoyer pour un basket sénégalais de haut niveau


Rédigé le Mardi 27 Mars 2018 à 14:56 | Lu 145 commentaire(s)



«Il est peu de circonstances où il vaille mieux parler que de se taire». Interpellé par cette maxime de pierre Jules hetzel, quisied bien au contexte basket-ball sénégalais, il est de notre responsabilité de nous prononcer en tant qu’ancien basketteur international sur la situation de cette discipline qui a jadis fait la fierté de notre pays. Nous choisissons de ne pas nous inscrire dans l’ère du temps présent (émergence) pour magnifier les résultats prometteurs, obtenus par nos basketteuses et basketteurs, ces temps-ci, dans les compétitions continentales.

Cette posture procède de ce que notre basket a pendant très longtemps été dominateur en Afrique aussi bien en clubs qu’en équipe nationale avec 16 trophées continentaux (5 chez les garçons et 11 chez les filles), pour ne pas être qualifié d’émergent. Ce qui est d’autant plus vrai que ces résultats s’inscrivent le plus normalement du monde dans l’ordre naturel des choses, pour un grand pays de basket comme le nôtre.
À ce sujet, nous saluons, la première place acquise lors de la première phase des éliminatoires du mondial 2019 en chine. Cependant, un retour au sommet du basket-ball africain voire la réalisation de notre ambition d’être parmi les meilleurs du monde, ne saurait se réaliser sans reconnaître les maux qui gangrènent notre basket depuis fort longtemps. la politique de l’autruche n’a jamais triomphé. Il est temps, s’il s’avère que nous nourrissons l’ambition de faire de ce basket un des meilleurs du continent voire du monde, que l’on brise les tabous et que les mauvaises graines y soient extirpées.

Les scandales, les errements, le manque de professionnalisme avec lequel les compétitions sont organisées, la qualité des infrastructures délaissées au profit d’un égocentrisme érigé en mode de gestion, qui cacherait des ambitions personnelles inavouées, ne peuvent plus continuer et ne sont porteurs d’aucun progrès pour notre basket, quels que soient les moyens qu’on y mettra. aussi, un diagnostic de ce mal profond pourrait se réaliser à travers une gille d’analyse à la swot qui évaluerait d’une part, nos forces et faiblesses et d’autre part, les opportunités et menaces qui se présentent pour cette discipline qui a acquis ses lettres de noblesse depuis fort longtemps.
 
Les forces et faiblesses qui caractérisent notre basket
 
Les points forts actuels de notre basket sont d’une part, de pouvoir compter sur la tradition de pays de basketteurs qui en fait un vivier naturel, pourvoyeur de joueurs talentueux comme en témoigne l’éclosion de pépites dans tous les coins du pays qui fait de nos régions de l’intérieur de potentielles rivales de Dakar, restée longtemps en avant sur cette discipline. et d’autre part, de disposer d’un avantage du fait de la qualité de ses ressources humaines (malheureusement en voie de disparition progressive) avec la présence de hauts techniciens et de cadres, constitués d’hommes bien formés et d’anciens basketteurs et basketteuses qui ont fait les beaux jours de beaucoup de clubs en France, des pays du golfe et de l’Amérique sans compter un public friand de basket.
 
Mais faudrait-il encore qu’on puisse disposer de leur expertise. Sans aucune considération corporatiste, force est de reconnaître que cette discipline comme toute autre d’ailleurs, est dirigée partout en Afrique par des hommes du sérail, doublés bien entendu de la qualité de manager.
 
Nos faiblesses qui expliquent toutes nos contreperformances d’aujourd’hui pourraient se résumer en ces quelques mots : déficit criard de moyens financiers, matériels et infrastructurels, absence de territorialisation de la discipline qui permet de la faire essaimer partout dans le pays, absence de politique sportive pour ne pas parler de volonté politique et subséquemment d’une planification stratégique sans laquelle, l’atteinte des objectifs que l’on se fixe, quelles qu’en soient la dimension et la temporalité, ne saurait être garantie. Voilà autant de menaces réelles qui pourraient contrarier des opportunités sûres et certaines.
 
Il suffit de constater l’improvisation avec laquelle, les compétitions nationales et internationales sont gérées pour se rendre compte que, malgré les quelques résultats prometteurs évoqués plus haut que notre basket a du plomb dans les ailes. En effet, l’organisation du dernier Afrobasket (accueil et hébergement des officiels et délégations) et l’étirement en longueur du calendrier des rencontres du championnat national ont fini de révéler les carences notoires dans la gestion de notre basket qui gagnerait à être professionnalisé. Le moins que l’on puisse dire est le basket sénégalais souffre, au-delà du manque de moyens, d’une absence de planification et d’une faiblesse notoire au niveau de sa gouvernance financière et administrative, complètement aux antipodes des standards mondiaux. Dès lors, force est de se rendre compte que les menaces qui pèsent sur notre basket sont d’ordre endogène (c’est-à-dire consécutives à nos propres insuffisances) et qu’il suffit d’un changement de paradigme, bien entendu avec des hommes qui en ont la capacité, pour les neutraliser.
 
Cela est d’autant plus important que les opportunités certaines qui se profilent ne sauraient être traduites en succès qu’avec un cadre organisé, dénué de toute forme d’amateurisme. entre autres opportunités, on peut citer les dispositions affichées de l’Etat de faire du basket une discipline phare après le football avec la construction à Diamniadio, d’un stadium moderne doté de tous les standards mais également le projet d’appui très sélectif de la FiBa Afrique de doter les fédérations nationales du Sénégal, la côte d’ivoire, le Nigeria, le mali et le Congo RDC, d’un siège fonctionnel et d’une politique d’accompagnement en vue de les amener à se moderniser et se professionnaliser mais aussi à asseoir une bonne gouvernance des moyens et de la pratique sportive.
 
Effectivement, la FiBa a projeté de lancer un vaste programme de visites des fédérations nationales précitées dans le courant du mois de mai 2018 avec à la clé : rencontre avec les autorités et partenaires, workshop (ateliers thématiques) avec la fédération nationale dans l’optique d’asseoir un cadre pour la bonne gouvernance de la discipline et la signature d’accords et de contrats d’objectifs avec les fédérations nationales concernées.
 
Le choix porté par la FiBa sur ces fédérations est loin d’être gratuit, il découle d’une ambition de faire figurer le basket africain dans le gotha mondial et d’en faire un levier de promotion sociale pour les jeunes. Ce concours de la FiBa fera l’objet d’évaluations qui conditionneront sa reconduction. sous ce rapport, il faudra mettre en place un réceptacle qui devra être géré par des hommes du sérail aux profils académique et managérial avérés, imprégnés des valeurs d’éthique, d’équité et d’intégrité qui sont le soubassement de la bonne gouvernance. Cette bonne gouvernance qui se trouve en bonne place dans l’ère du temps, est une des conditionnalités pour bénéficier de l’appui de la FiBa. Le choix d’Abidjan pour abriter le siège de la FiBa ne découle pas du hasard. Il est le fruit d’avancées significatives aussi bien dans la gestion et des résultats. Des avancées tributaires d’une politique sportive ambitieuse portée par des hommes du sérail qui ne respirent que pour le basket.
 
Le basket-ball, un levier de promotion sociale pour la jeunesse
 
Les ambitions de la FiBa dépassent de loin les succès au plan sportif mais s’inscrivent dans une dynamique socio-économique qui ferait du basket un véritable levier de croissance pour nos pays afin de contribuer à la promotion sociale des jeunes du continent par une résorption du chômage.
 
Des experts en matière de développement prédisent un avenir prometteur pour notre cher continent en termes de croissance. Il est indéniable que le sport pourrait en constituer un des moyens. Aussi, il revient aux dirigeants de notre basket de s’inscrire dans ce sillage tracé par la FiBa afin de le rendre attrayant avec comme finalité la promotion sociale de la jeunesse de notre pays.
 
Une petite observation de ce qui se fait au niveau des centres de formations des jeunes qui, gagneraient à être appuyés par la fédération, permet de constater que le pays regorge de potentiels Gorgui Sy Dieng. Pour qui connaît la part de contribution de la diaspora en matière de transfert d’argent et son impact socio-économique sur les populations, il va sans dire, pour ce dernier qu’un levier comme le basket a sa partition à jouer dans ce domaine. Le basket de haut niveau a ses exigences propres qui ne peuvent plus s’accommoder d’un certain amateurisme et d’une absence de bonne gouvernance.
 
Mathieu FAYE
Ancien basketteur professionnel,
Actuel vice-président de la commission des fédérations à la FiBa



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