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CM 2018 Sénégal : Satisfactions et regrets d’une symphonie inachevée


Rédigé le Mardi 10 Juillet 2018 à 17:14 | Lu 122 commentaire(s)



Sénégal-Pologne 2-1, Sénégal-Japon 2-2, Sénégal-Colombie 0-1. Entre ces trois scores, une leçon de vie ou plutôt une leçon d’apprentissage pour un jeune entraineur. Quand on est Africain, le plus jeune entraineur du mondial de surcroît, qu’on a une fois gouté aux délices d’une phase finale de coupe du monde en tant que joueur, un tel parcours laisse penser qu’on a réussi son coup d’essai.

Quand on analyse le parcours des Lions qui s’est soldé par trois sorties : une victoire, un nul et une défaite, on se dit que le Sénégal n’a pas été ridicule. Loin s’en faut.  L’honneur est sauf si l’on en juge par les scores enregistrés et la manière dont les Lions ont été écartés de la compétition. Eliminés sur la base d’un nouveau règlement : le VAR et le décompte des cartons, le Sénégal vient encore de marquer de son empreinte l’histoire du football mondial comme il l’avait fait en 2002 avec le but de la mort. Cette irruption dans l’histoire du football mondial n’est pas anodine car on retiendra ce fait dans les annales du football. Tout comme on retiendra que le Sénégal est la seule équipe du monde à être éliminée au décompte des cartons jaunes (avertissements). Aliou Cissé et ses joueurs peuvent être fiers de cette marque indélébile qui restera gravée dans les mémoires et dans la conscience des juges du VAR qui ont refusé le pénalty net du Sénégal face à la Colombie.

Mais là s’arrête le constat. L’équipe des Lions n’était certes pas annoncée comme l’une des grandes favorites du tournoi. Mais elle était attendue par la grande porte. Beaucoup d’experts du ballon rond étaient prêts à lui dérouler le tapis rouge. Sa qualification pour le second tour n’aurait pas été une surprise pour les héritiers de la génération de 2002. La génération des Elhadj Diouf, Fadiga, Pape Bouba Diop, Henry Camara semblait tenir en Sadio Mané, Daio Baldé Keita, Mbaye Niang, Ismaila Sarr, les héritiers légitimes pour porter le flambeau encore plus loin que les quarts de finales de 2002. Tout portait à le croire vue la valeur intrinsèque de ces jeunes joueurs qui font le bonheur de leurs clubs respectifs. Contrairement à leurs ainés d’il y a seize ans, la génération de 2018 n’est pas sortie de l’anonymat. Toutes ses composantes sont connues et reconnues parmi l’élite du football mondial.

Pourquoi alors les fruits n’ont pas répondu à la promesse des fleurs ? Telle est la question centrale à laquelle nous devons  tenter de répondre. De la pertinence de la réponse dépend le futur de cette équipe qui avait suscité tant d’espoirs et charrié tant de certitudes quant à sa capacité  à  surmonter toutes les épreuves.

Si beaucoup ont parlé de gâchis à la suite de ce mondial, c’est parce qu’elle concentrait un potentiel de talents inhabituel dans une équipe. Avec un Sadio Mané incontestable à Liverpool, deuxième plus grand club européen de l’année, un Kalidou Coulibaly considéré comme l’un des meilleurs défenseurs du monde du moment, un Ismaila Sarr et un Diao Baldé révélateurs et animateurs du championnat français. Tout laissait croire que l’orchestre allait entonner une belle symphonie. Hélas, on eut droit à une symphonie inachevée du fait des fausses notes et des dissonances de Sadio Mané, que ni Baldé longtemps laissé sur la touche, ni Issmaila Sarr encore à l’apprentissage de la haute compétition n’ont pu compenser. Seul Mbaye Niang, trop esseulé et parfois confiné dans un rôle ingrat de récupérateur a tenté tant bien que mal de jouer sa partition.

La question que l’on se pose aujourd’hui, est de savoir si Aliou Cissé a pu disposer de son effectif au complet tellement l’absence de Kara Mbodj (blessé bien avant la compétition et maintenu malgré tout) Diao Baldé, Moussa Sow dont l’expérience aurait pu servir dans ce contexte, les gardiens suppléants Abdoulaye Diallo et Mendy dont l’entrée à la place de Khadim Ndiaye aurait pu rassurer ses coéquipiers après le match raté du portier titulaire contre le Japon. Sans verser dans le fétichisme des absents dont on dit qu’ils ont toujours raison après les mauvais matches, on peut tout de même s’interroger sur la pertinence de certains choix. On comprend, sous ce rapport, certaines frustrations exprimées par des joueurs qui auraient pu être mieux utilisés si le coach avait fait une bonne analyse des adversaires et de la nature des matches à disputer.

C’est sans doute à ce niveau que le Sénégal a surtout pêché. L’étude des forces et faiblesses de l’adversaire aurait sans doute permis au staff technique de mieux préparer les matches et de se mettre à l’abri de certaines surprises comme devant le Japon et la Colombie. Sur ce chapitre, force est de reconnaitre que les superviseurs des équipes adverses ont failli à leur mission si tant est qu’ils n’ont pas décelé ces forces et faiblesses des adversaires.   Quand on supervise un adversaire, on le décortique sous toutes ses facettes technico-tactiques et dans ses individualités. Sur ce plan le Sénégal a fait preuve d’une naïveté coupable que rien ne saurait justifier.

Le second constat relève du dispositif technico-tactique selon les situations du match. Sur ce plan, le Sénégal n’a jamais été maitre du jeu. Si devant la Pologne, les Lions ont eu la chance d’avoir une avance de 2 buts, ils ont cependant donné des signes de fébrilité quand l’adversaire a décidé d’accélérer le jeu. C’est à partir de cette première sortie que les faiblesses ont commencé à faire jour.  On ne le dira jamais assez, la haute compétition exige des joueurs prêts à tous les temps et à tous les régimes. La principale faiblesse des Lions est qu’ils sont souvent dépassés dès que l’adversaire hausse le ton et commence à imposer son jeu. Cette carence traduit une faiblesse dans la préparation physico-tactique. La question de la motricité se pose à ce niveau car les joueurs qui ont souvent de la peine à s’adapter au jeu pour conserver le résultat. Face au Japon, les frayeurs ont commencé quand les japonais ont fait courir la balle et misé sur la supériorité numérique. Les lions en ont fait les frais pour n’avoir pas su assurer une bonne couverture de leurs arrières face aux balles envoyées dans le dos de la défense. Le latéral droit Wague en a pâti pour n’avoir pas été soutenu dans ses efforts alors qu’il a réussi un grand match sur le plan offensif en marquant le deuxième but.

Face à la Colombie, la principale faiblesse des Lions a été, encore une fois, de croire qu’un match se joue en 45 minutes. En jetant toutes leurs forces dans la bataille dans les premières 45 minutes, ils se sont épuisés au fils du temps au risque de laisser le jeu à leurs adversaires en seconde mi-temps. L’encadrement technique n’a pas su gérer les temps forts et les temps faibles. Il n’a pas non plus compris que le comportement attentiste de l’adversaire en première mi-temps n’était qu’un piège souvent tendu aux Africains pour les  éprouver. Les Lions sont tombés dans le piège alors que leur position de leader du groupe leur imposait simplement de contrôler l’adversaire à distance en s’adaptant à son jeu.

Il va de soi que d’autres faiblesses sont notées tant dans la sélection des joueurs, dans le choix du dispositif tactique que dans l’utilisation des temps de jeu. Des faiblesses sur lesquelles nous reviendrons ultérieurement.


Mamadou Kassé
senegalfootballclub.com








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